Par Louis Lizotte, CFA, FRM, vice-président, Gestion des placements, Gestion FÉRIQUE
Source : MSCI
Sources : Banque du Canada, Réserve fédérale de St-Louis, Agence d'information sur l'énergie des États-Unis
Ce trimestre fut bondé de nouvelles qui ont contribué à la polarisation des scénarios de rendements attendus, alors que les investisseurs dans le marché obligataire entrevoient une faible croissance à l’horizon. Les marchés boursiers, eux de façon globale, continuent leur ascension.
En analysant les scénarios possibles à moyen terme pour les rendements boursiers en général, nous parlons en langage statistique d’une courbe normale avec une probabilité plus élevée d’avoir un résultat se situant dans les deux queues de la distribution (« fat tails »).
Illustration de distributions de rendements
Source : Gestion FÉRIQUE
Ainsi, la probabilité d’un choc dans un sens comme dans l’autre est plus importante.
• Scénario de rendements négatifs (vers la gauche) :
o Effet de la guerre commerciale (diminution des dépenses des entreprises)
o Amplification des crises géopolitiques (choc pétrolier)
o Récession mondiale
• Scénario de rendements positifs (vers la droite) :
o Entente entre la Chine et les États-Unis.
o Mesures fiscales (Europe, Chine)
o Rebond des indicateurs avancés (manufacturier)
Malgré cette volatilité, les rendements depuis le début de l’année continuent d’être très intéressants. Voyons-y de plus près.
Source : Trust Banque Nationale
Les efforts de soutien attendus des banques centrales se sont matérialisés au troisième trimestre. La Réserve fédérale des États-Unis (Fed) a abaissé le taux directeur à deux reprises, alors que la Banque centrale européenne (BCE), sous la fin du règne de M. Draghi et du début de celui de Christine Lagarde (il importe de mentionner que c’est la première femme à occuper ce poste) a confirmé un retour à l’assouplissement quantitatif.
Comparaison des taux d’intérêt directeurs
Source : Bloomberg
En étudiant les taux à plus long terme, nous observons encore une baisse des taux d’intérêt de référence 10 ans.
Comparaison des taux d’intérêt à long terme
Source : Bloomberg
Dans ce contexte, le Fonds FÉRIQUE Obligations canadiennes et le Fonds FÉRIQUE Revenu mondial diversifié ont généré respectivement des rendements de 0,8 % et de 1,6 %.
Qu’est-ce que ces résultats nous révèlent, au-delà du fait qu'ils expliquent pourquoi les rendements obligataires sont très appréciables cette année? Notamment, qu’une faible croissance économique, voire une récession, est attendue selon plusieurs.
En date de rédaction, il est anticipé dans les marchés que la Fed baissera le taux directeur encore trois fois dans les prochains douze mois. C’est considérable car le pays n’est pas en récession et ne semble pas en voie de le devenir à court terme.
En Allemagne, le gouvernement a émis des titres de 30 ans à un taux à l’échéance négatif ; cela signifie donc que quiconque achète cette obligation perdra de l’argent. Par contre, la Banque fédérale d’Allemagne, la Bundesbank, a dû acheter environ 60 % de l’émission d’obligations. Cette anecdote est très révélatrice en ce sens que les banques centrales sont maintenant contraintes à employer des mesures extrêmes qui favorisent les distorsions de marchés.
Pour le trimestre, les secteurs traditionnellement défensifs ont mené, alors que les secteurs plus sensibles au commerce mondial ont été à la traîne. Au Canada, le secteur qui a été le moins performant est celui de la santé, torpillé par les titres de cannabis.
Les rendements du marché canadien de 2019 à ce jour et du troisième trimestre 2019
Source: MSCI
Le marché boursier canadien, mesuré par l’indice MSCI Canada, a obtenu un rendement de 2,0 % au troisième trimestre.
Les données économiques continuent d’être agréablement positives au Canada. Les plus récents chiffres sur l’emploi démontrent la meilleure performance depuis 2002 au pays. Au Québec, il s’agit du plus faible taux de chômage de notre histoire !
Au niveau mondial par contre, les données économiques plutôt incertaines ont eu pour effet de sortir l’or de sa torpeur. Nous savons que ce métal ne rapporte aucun revenu, car en détenir en quantité importante engendre un coût d’entreposage. C’est pourquoi dans un environnement économique « normal », il n’existe pas beaucoup de bonnes raisons d’en détenir. Par contre, il y a en circulation présentement près de 15 000 000 000 000 $ USD d’obligations dont le taux de rendement à l’échéance est négatif. Quel est le lien avec l’or ? L’or devient intéressant comme préservation de valeur si on envisage une récession ainsi qu’une baisse importante des marchés dans un contexte où des investissements traditionnellement sécuritaires (obligations allemandes, suisses, japonaises, etc.) procurent un rendement négatif.
Le graphique suivant, de Schroders, présente l’évolution du prix de l’or et de la quantité d’obligations à rendement à l’échéance négatif.
Évolution du prix de l’or et de la quantité d’obligations à taux de
rendement à l’échéance négatif
Source : Schroder et Bloomberg, CS 1854
Les producteurs d’or sont de ce fait de grands gagnants cette année. Au Canada par exemple, cinq des dix titres détenant la performance boursière la plus élevée en 2019 sont des producteurs d’or. Nous parlons ici de chiffres très élevés comme 168 % pour Eldorado Gold, 117 % pour Alacer Gold et 94 % pour Centerra Gold. Bien sûr, il faut dire que ce secteur a connu sa part d’enjeux dans les dernières années. Eldorado Gold a perdu pratiquement 90 % de sa valeur entre janvier 2015 et novembre 2018. La même situation s’est produite dans le cas des deux autres entreprises ; leurs valeurs se sont dépréciées d’environ 30 % durant la même période. C’est une industrie éminemment cyclique et l’historique boursier en témoigne.
À l’opposé, le secteur de la santé a perdu des plumes en 2019. La dégringolade de deux titres en particulier illustre bien les problèmes auxquels fait face cette industrie naissante. Dans le cas d’HEXO Corp. par exemple, l’entreprise n’a toujours pas déclaré de profits malgré des revenus en hausse. En ce qui concerne CannTrust, ce sont plutôt des enjeux légaux et de gouvernance qui ont échaudé les investisseurs. Encore ici, le potentiel de gains est intéressant. Il faut toutefois comprendre le risque inhérent à ce genre d’investissement.
Il est difficile de comprendre ce qui se passe présentement entre la Chine et les États-Unis. La courbe de taux d’intérêt s’est encore inversée et les démocrates ont finalement décidé de tenter le coup de la destitution, résultant en un trimestre assez volatil aux États-Unis. Ainsi, à l’image du Canada, les secteurs plus défensifs comme la consommation de base et les services publics ont obtenu les meilleurs résultats. Le secteur de la santé continue de tirer de l’arrière mais pas pour les mêmes raisons qu’au Canada. C’est plutôt que plusieurs enjeux discutés dans le cadre de la campagne électorale touchent ce domaine et créent de l’incertitude.
L’indice a obtenu un rendement de 2,9 % (MSCI États-Unis en $ CA). L’appréciation du dollar américain par rapport au dollar canadien a occasionné une augmentation du rendement en dollars canadiens d’environ 1,3 %.
Nous pourrions débuter en discutant du sujet du jour au moment d’écrire ces lignes : la procédure de destitution.
Depuis qu’il a été élu, le président Trump fait immanquablement face à cette menace que laissent planer les démocrates. C’est maintenant devenu une réalité. Le 24 septembre dernier, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a annoncé que la Chambre procédait actuellement à une enquête de destitution officielle du président.
Sachant qu’il s’agit d’un processus politique et non d’un processus légal, il demeure improbable que le président soit destitué à moins qu’il ne gagne les élections en 2020 et que les démocrates deviennent majoritaires au Sénat. En résumé, les démocrates (majoritaires à la Chambre des représentants) sont responsables d’initier le processus, mais c’est le Sénat (les républicains y sont majoritaires) qui tranche. En outre, une majorité des deux tiers des votes favorables est nécessaire pour que le président soit démis de ses fonctions.
Puisque Donald Trump jouit toujours d’un fort soutien de ses troupes, une preuve irréfutable de malversation serait nécessaire afin que suffisamment de sénateurs républicains appuient une destitution.
Ainsi, il semble que M. Trump fasse le pari, en rendant disponibles rapidement les détails de l’appel avec le président ukrainien, qu’il n’a rien fait de mal et que les démocrates se tirent dans le pied avec leurs efforts partisans pour une destitution. Les allégations contre Joe Biden (et son fils), le candidat démocrate qui a la plus grande probabilité de battre le président Trump aux élections de 2020, ont aussi évidemment bonne presse dans le camp républicain. D’ailleurs, c’est maintenant Elizabeth Warren qui mène la course démocrate dans les sondages.
Puis, quel est l’effet de cette perspective sur les marchés boursiers ? Mise à part l’incertitude qu’elle apporte, notons que lors de situations similaires dans le passé, l’économie l’avait emporté sur la politique dans son influence sur les marchés boursiers.
Ce qui nous amène à discuter de la situation économique mondiale qui poursuit son ralentissement progressif. Depuis plusieurs mois déjà, nous notons une régression prononcée du secteur manufacturier. Nous pouvons établir un lien évident avec l’incertitude provenant du protectionnisme ambiant et des tarifs actuels et potentiels. J’y reviendrai pour le reste du monde, mais aux États-Unis, cette situation n’était pas encore un enjeu avant le troisième trimestre. C'est maintenant le cas, car non seulement l’indice PMI manufacturier a franchi le seuil de 50, indiquant un pessimisme des répondants au sondage, mais l’indice non-manufacturier (services) a également commencé à fléchir et s’approche de 50.
Évolution de l’indice PMI Manufacturier et Non-manufacturier
* INSTITUTE OF SUPPLY MANAGEMENT
Source : BCA Research
Le fait que le secteur des services se maintenait était rassurant, puisqu’il représente une portion plus importante de l’économie des pays développés. Ce contexte a réduit les attentes des investisseurs envers les résultats des entreprises américaines. Comme l’expression le dit, la barre est basse, ce qui a laissé plus de place à des surprises positives dans le dernier trimestre… à moins d’une détérioration continue de ces indicateurs avancés.
Finalement, une étude de BCA Research nous révèle qu’aux États-Unis, à chaque fois qu’un président américain a convoité la présidence lors d’une période de récession, il a perdu ses élections. Il ne fait aucun doute que M. Trump est au fait de cette statistique et il faut s’attendre à des actions en ce sens ou à des mesures de sa part d’ici l’automne 2020.
Malgré le soubresaut du pétrole, le dollar canadien s’est déprécié face au dollar américain et au yen, permettant ainsi un rendement un peu plus élevé en dollars canadiens. Par contre, l’euro a baissé de près de 3 % face au huard, amputant du même coup le rendement provenant des titres de cette région. Il en résulte donc un trimestre plutôt timide en termes de rendements des actions internationales.
Rendements de différents indices MSCI pour le troisième trimestre de 2019
Source : MSCI
Les indices MSCI Europe, MSCI Asie Pacifique (tous pays) et MSCI Marchés Émergents ont obtenu respectivement des rendements de -0,5 %, -0,1 % et -2,9 % en dollars canadiens.
Les signaux économiques provenant de l’Europe continuent d’inquiéter, particulièrement en Allemagne qui est l’économie la plus importante de la zone euro et dont le marché boursier représente environ 27 % de l’Indice MSCI Eurozone.
Comme mentionné précédemment, le principal élément en cause est le ralentissement du commerce mondial, qui continue inexorablement et qui est alimenté par la dispute commerciale entre les Américains et les Chinois. Clairement, certains pays sont plus touchés que d’autres et c’est ce que le graphique suivant démontre.
Exposition par pays au commerce mondial
Source : Dynamics, OCDE et FMI
*Commerce total = exportations + importations (biens & services)
Notez que la Chine inclut seulement les biens.
L’Allemagne étant une économie très ouverte, la sensibilité aux enjeux commerciaux y est importante. De plus, le secteur automobile mondial continue d’être sous pression ce qui affecte entre autres l’Allemagne, mais aussi le Japon. Les achats de voitures en Chine ont fortement diminué plus tôt dans l’année, et les manufacturiers automobiles en général doivent respecter des normes environnementales plus strictes. Ainsi, en Allemagne comme au Japon, on parle essentiellement de « récession manufacturière ».
Durant le trimestre, les situations de crises ont perduré et le risque géopolitique est demeuré omniprésent. Ceci dit, l’attaque contre les infrastructures pétrolières saoudiennes a de quoi inquiéter l’économie. L’escalade progressive des tensions entre les États-Unis (et leurs alliés), puis l’Iran, s’est accentuée suite à ce fâcheux événement. Les manchettes ont principalement fait état de l’impact potentiel sur le prix du pétrole. Ce dernier a évidemment bondi durant une certaine période, mais s’est abaissé en raison des stocks américains toujours importants. Toutefois, il ne faut pas passer sous silence l’impact que cette catastrophe a sur les populations civiles prises dans ce conflit, comme au Yémen.
Finalement, du côté chinois, plusieurs pensent qu’ils tentent d’étirer les négociations avec M. Trump en espérant qu’il perde les élections et qu’il soit plus facile de négocier avec le (ou la) remplaçant (e). Évidemment, tout dépendra de l’individu, mais il faut savoir que les positions de Mme Warren sur les droits humains et les enjeux environnementaux ne risquent pas de rendre les négociations si simples.
Les gains de 2019 sont encore importants. Les signaux économiques continuent de pointer vers un ralentissement et pour certains pays, la récession est toute proche. Par contre, les banques centrales y vont encore d’efforts importants et des mesures fiscales expansionnistes sont source de discussions dans plusieurs régions.
Comment naviguer dans le contexte actuel, qui pourrait mener à des hausses importantes comme à des baisses importantes de marchés ? La réponse n’est pas simple. Par contre, il est connu que les décisions des investisseurs optant pour une stratégie à long terme ne devraient pas être influencées outre mesure par ce contexte.
Il y a plusieurs stratégies qui peuvent être adoptées tout dépendant de notre situation. Il peut être intéressant de conserver un niveau de liquidité plus élevé tout en maintenant une exposition aux actions. Ainsi, nous profitons d’une hausse de marché tout en détenant des liquidités à investir dans l’éventualité d’un scénario négatif.
Ultimement, il est important de revoir nos objectifs et l’ensemble des contraintes (horizon de temps, tolérance au risque, etc.) et de s’assurer de posséder une stratégie adéquate en place ou de rééquilibrer nos avoirs afin de s’aligner sur celle-ci.
Au plaisir !
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